
Pour beaucoup de salariés et d’employeurs, la question des heures supplémentaires et de leur compensation peut devenir un vrai casse-tête. En effet, deux mécanismes clés existent : la contrepartie obligatoire en repos (COR) et le repos compensateur de remplacement (RCR). Mais quelles sont leurs différences ? À quoi servent-ils ? Et dans quels cas s’appliquent-ils ? Je vous propose de décortiquer ces deux notions.
La contrepartie obligatoire en repos : applicable pour les heures supplémentaires réalisées au-delà du contingent annuel
La contrepartie obligatoire en repos (COR) est un droit attribué au salarié qui effectue des heures supplémentaires au-delà d’un certain plafond annuel appelé contingent. Ce mécanisme est prévu par l’article L. 3121-30 du Code du travail. Il s’applique automatiquement dès que le nombre d’heures supplémentaires réalisées dépasse 220 heures par an. Cette limite est d’origine légale, des conventions ou accords collectifs peuvent prévoir des limites différentes.
Quoi qu’il en soit, la COR ne peut pas être remplacée par un paiement. C’est un repos qui doit obligatoirement être pris. Il est assimilé à du temps de travail effectif pour le calcul des droits (ancienneté, congés, etc.)
Ce dernier est calculé comme suit :
- Dans les entreprises de 20 salariés au plus : 50% des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent (soit 30 minutes de repos pour chaque heure supplémentaire).
- Dans les entreprises de plus de 20 salariés : 100% (soit 1 heure de repos pour chaque heure supplémentaire dépassement).
Le droit à contrepartie obligatoire en repos est réputé ouvert dès que la durée de ce repos atteint 7 heures. Il doit être pris dans un délai maximal de 2 mois. L’absence de demande de prise de la contrepartie obligatoire en repas par le salarié ne peut entraîner la perte de son droit. Dans ce cas, l’employeur lui demande de prendre effectivement son repos dans un délai maximum d’un an.
À titre d’exemple, une salariée travaille dans une entreprise de 30 salariés. Le contingent annuel est de 220 heures. Elle effectue 235 heures supplémentaires dans l’année. Elle a donc 15 heures de dépassement : elle doit bénéficier de 15 heures de COR.
Repos compensateur de remplacement : une compensation négociée
Le repos compensateur de remplacement (RCR) est un mécanisme plus souple, prévu par l’article L. 3121-28 du Code du travail. Il permet, sous certaines conditions (notamment via accord collectif), de substituer à tout ou partie du paiement des heures supplémentaires un repos équivalent.
Le remplacement du paiement de l’heure supplémentaire par du repos doit être prévu par accord d’entreprise, d’établissement ou de branche. En l’absence de délégué syndical, l’employeur peut instaurer ce dispositif dans le cadre d’une décision unilatérale, à condition que le Comité Social et Économique (CSE), s’il existe, ne s’y oppose pas.
Le repos compensateur de remplacement, s’il existe dans l’entreprise, remplace en tout ou partie du paiement de l’heure supplémentaire et de sa majoration. Il doit être équivalent à ce que le salarié aurait perçu en salaire majoré. Ainsi, une heure supplémentaire majorée à 25 % peut être remplacée par 1h15 de repos (1h de travail + 0,25h de majoration)
Par exemple, un salarié travaille dans une usine soumise à une convention collective qui autorise le repos compensateur de remplacement. Pour 4 heures supplémentaires majorées à 25 %, au lieu d’être payé 125% de son taux horaire pour ces heures, le salarié bénéficiera de 5 heures de RCR (4h x 1,25).
Le salarié doit être informé du nombre d’heures de repos cumulées sur un document annexé au bulletin de paie. Dès que ce nombre atteint 7 heures, ce document comporte une mention notifiant l’ouverture du droit à repos et l’obligation de le prendre dans un délai maximum de 2 mois après son ouverture.
Les heures supplémentaires donnant lieu à du RCR ne sont pas décomptées du contingent de 220 heures, mais uniquement à condition que :
- La compensation en repos soit totale (pas de paiement partiel)
- Elle couvre à la fois le temps de travail et la majoration
Si l’accord collectif ne prévoit qu’une compensation partielle en repos, les heures supplémentaires continuent d’être imputées sur le contingent annuel.
Le RCR est également assimilé à du temps de travail effectif pour le calcul des droits du salarié.
Contrepartie obligatoire en repos vs repos compensateur de remplacement : les différences clés
Critère | Contrepartie obligatoire en repos (COR) | Repos compensateur de remplacement (RCR) |
Fondation juridique | Art. L3121-30 du Code du travail | Art. L3121-28 du Code du travail |
Quand s’applique-t-il ? | Dès dépassement du contingent annuel | Par accord collectif d’entreprise, d’établissement ou de branche En l’absence de délégué syndical : dans le cadre d’une décision unilatérale de l’employeur à condition que le CSE ne s’y oppose pas, s’il existe. |
Obligatoire ou facultatif | Obligatoire, d’ordre public | Facultatif, mis en place par accord collectif |
Substitution au paiement | Non, le paiement n’est pas possible | Oui, remplace salaire/majoration |
Quotas (heures concernées) | Seulement les heures > contingent | Toutes les heures supplémentaires |
Calcul | 50% ou 100% selon effectif | Équivalent au paiement majoré |
Pause : jours/demi-journées ? | Oui | Oui |
Assimilé à du temps de travail (ancienneté, congés payés) ? | Oui | Oui |
Délai de prise | 2 maximum | Précisé par accord collectif/loi (souvent 2 mois) |
La contrepartie obligatoire en repos et le repos compensateur de remplacement constituent deux réponses différentes à la compensation en repos du travail supplémentaire. La COR est obligatoire à partir d’un certain volume d’heures, tandis que le RCR est facultatif et nécessite un accord collectif. Ces règles visent à garantir un équilibre entre la productivité attendue par les entreprises et la protection de la santé des salariés.

Emmanuelle Delaunay
Avocate inscrite au barreau de Toulouse
Activités dominantes :
Droit du travail et Droit de la sécurité sociale